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bonjour,
pour des raisons techniques liées au blog de davide murano (et ce depuis mi-août) les messages postés
Par Note des éditions , le 27.10.2010
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· Le Lido des Sénégalais.
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· La Scuola dei Morti (l'école des morts).
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· Venise autrement...
Date de création : 11.06.2010
Dernière mise à jour :
22.09.2011
38 articles
" Ville du futur ", écrivent , sur Venise et les îles, certains spécialistes. Qui bien sûr, habitent ailleurs et viennent ici une fois par an. Ils expliquent : circulation bien répartie entre rues et canaux ; regroupement par " insulae ", vie de quartier, tout autre chose que dans n'importe qu'elle autre agglomération, tout autre chose qu'à Milan.
C'est possible. Mais la circulation, on ne la voit pas. îles ou " insulae " sont à la fois délabrées et englouties. Vie de quartier, il n'y a pas un chat en hiver. Est-ce vraiment ça , la ville du futur ?
Oui, une présence, il y en a une, là au coin, la dernière qui attend ( les autres sont parties en Amérique), l'orbite gauche est vide, l'oeil droit à été peint par un fou... Elle vacille, cette dernière présence, cette statue au pluriel, sous les coups de la bora, ce vent tourbillonnant et trop souvent présent. Il arrache la peau, s'engouffre entre les murs resserrés, force les entrées du moindre dédale.
Tant pis. On avance. Entrer ou renoncer ? Je touche le mur de brique, friable, tendre et humide. L'accès s'ouvre, nous aspire. C'est bien elle, la ville " sexe-femelle " d'Apollinaire et de tous ceux qui la caresse avec un peu d'amour, le soir qu'il faut... Le soir où l'on se sent de trop, ou trop seul.
" Soir dément ", comme on dit ici. Froid et désert d'un quelconque dimanche d'hiver, première lune du nouveau janvier.
Un restaurant à moitié ouvert ; sans enseigne ni publicité. A l'intérieur, guère plus qu'une soupente dominé par deux femmes de l'île, toujours en mouvement, avec des mains comme des battoirs.
Des tables de bois, de vieux buffets, une photo de groupe avec les bateaux de régates : la vieille auberge que nous croyions disparue. Sur les étals, de petits poissons frits, de la polenta, du vin blanc. Malgré le tourisme, quelque chose demeure, pour la raison que c'est une ville démentielle, selon les spécialistes, car d'après leurs thèses et malgré des millions de présences, elle n'est pas encore touristique au sens propre du terme, c'est à dire logique, occidental, pragmatique...
Les plus beaux soirs de l'année, ceux de l'hiver, elle se libère, prise par une sorte de coma, inhospitalière ; en rien touristique. Le maximum de la désolation est atteint au moment des fêtes les plus populaires : entre Noël et le Nouvel An. Ni un bateau, ni un café, ni un théâtre, ni un cinéma. Le résultat est la totale disponibilité. Plus besoin de réserver, durant des jours et des nuits, car la ville entière devient fantomatique, eau et pierres, tout compris. Elle est habitée juste ce qu'il faut, pour ne pas vous laisser tout à fait seul. Ca et là, dans quelques maisons, quelqu'un continue à allumer la lumière...et à la faire bouger.
De la fenêtre de l'auberge, je suis du regard deux gamins dehors, dans l'obscurité, sur le bord de l'eau. Ils vont et viennent sur la pointe des pieds, sans but et sans interdiction. Ils s'arrêtent où cela leur chante. Ils regardent , éblouis, les jeux superposés des rives, les grands palais blancs, les campaniles morts. Inconsciemment, ils vivent...
Désespoir pour cette infinité de choses à voir.
Tourment pour celles que je ne verrai jamais.
Trouble pour celles que je ne rencontrerai plus...
Oh ! combien tu me manques, Venise...